Conseils d'Instructeurs
Faut-il absolument éviter la verticale des aérodromes ?
Il y a une dizaine d’années, un rapport établi par la CSCA (Commission de Sécurité de la Circulation Aérienne) mettait en avant le fait qu’environ 80 % des quasi collisions entre aéronefs légers avaient lieu dans l’immédiate proximité des AD non contrôlés.
Si nos pilotes sont bien sensibilisés pendant leur formation au risque accru de rapprochements dangereux dans la circulation d’aérodrome, ils réduisent cependant la plupart du temps leur vision au seul circuit d’aérodrome et à leur seule activité.
Les ATZ
Afin de mieux protéger la circulation d’aérodrome d’éventuels conflits extérieurs, plusieurs pays de l’UE (Angleterre, Italie, etc.) ont implémenté depuis longtemps des ATZ (Aerodrome Traffic Zones), volumes d’espace cylindrique de 2000 ft de hauteur centrés généralement sur le point de référence de l’AD. Le rayon de ces ATZ est fonction de la longueur de piste mais il est généralement fixé à 2,5 NM, ce qui permet de protéger l’intégralité de la trajectoire d’un circuit rectangulaire classique (cf. figure ci-contre).
Les règles de l’Air en vigueur dans ces pays imposent aux pilotes de ne pas pénétrer à l’intérieur de ces ATZ sans contact radio préalable. La réglementation SERA ainsi que les annexes OACI y font également référence.
Si la France a commencé à mettre en place des TMZ et RMZ, elle n’a cependant pas encore implanté d’ATZ, partant du principe que sur les AD non contrôlés ou non AFIS, elles allaient de soi et que ce caractère implicite suffisait à alerter les pilotes en circulation dans le voisinage.
Passage verticale en navigation ?
Force est néanmoins de constater que si nos pilotes font la plupart du temps attention à ne pas entrer dans ces volumes implicites sans raison, ils continuent cependant à passer à la verticale des aérodromes lors de leurs navigations, arguant du fait que leur hauteur au-dessus des installations est supérieure au plafond de ces pseudo ATZ. C’est oublier un peu vite cependant, que d’autres activités sont susceptibles de se dérouler à la verticale de ces AD (voltige, largage para) et jusqu’à des altitudes bien supérieures à la hauteur maxi de reconnaissance utilisée par les pilotes à destination des installations.
Il faut reconnaître néanmoins que nos pilotes ne sont pas vraiment aidés en matière d’évitement des AD, étant inconsciemment favorisés dans la voie du survol par le système lui-même. Un AD constitue en effet un excellent repère de navigation, il figure sur toutes les cartes et dans n’importe quelle base de données GPS, il s’avère particulièrement accueillant en cas de panne verticale et notamweb demande à chaque requête aux pilotes, s’ils souhaitent avoir les NOTAM relatifs aux AD survolés.
On l’aura cependant bien compris, il est toujours préférable de passer au large des AD sur lesquels on ne compte pas atterrir, ce que n’arrêtent pas de répéter les instructeurs aux pilotes placés sous leur responsabilité, sans pour autant leur enseigner d’ailleurs ne serait-ce qu’un moyen simple de contournement.
Technique de contournement
Il est pourtant facile d’utiliser pour ce faire la simple transposition du procédé d’évitement des masses nuageuses enseigné pendant la formation (cf. figure ci-dessous).
C’est ainsi que pour un aéronef croisant à la vitesse standard de 120 kt, il suffit arrivé à 2 min de la verticale (ou 4 NM indiqués au GPS) d’obliquer de 60° d’un côté ou de l’autre pendant 2 min, puis de suivre une parallèle à la route initiale (offset) pendant les 2 min suivantes et à nouveau d’obliquer de 60° pendant encore 2 min avant de reprendre définitivement la route initiale. La méthode est simple à mémoriser puisque toujours liée à des portions de temps de 2 minutes (on démarre la manip à 2 min de l’AD, chaque branche successive dure 2 min et le temps de vol total supplémentaire est de 2 min). De plus, cette méthode est universelle puisque entièrement indépendante de l’orientation des trajectoires liée à celle de la ou des pistes de l’AD contourné. Pour terminer, elle comporte une marge de sécurité suffisante eu égard à l’arc DME de 2,5 NM, pour être utilisée telle que dans toutes les conditions de vent compatibles avec le vol VFR. Pas besoin donc de se torturer l’esprit avec d’éventuelles corrections de dérive et/ou de temps sur chaque branche.
Si votre avion a pour finir une vitesse de croisière de 100 kt et non de 120 kt, pas de problème puisqu’il suffit d’utiliser des portions de temps de 2 min 30 au lieu des 2 min précédentes. Le point de début du contournement (4 NM) ainsi que la trajectoire sol resteront les mêmes et permettront d’obtenir la même marge de sécurité d’un point de vue espacement latéral.
N’hésitez donc pas à utiliser désormais cette méthode simple plutôt que de continuer à survoler les AD à la verticale, avec le risque de vous retrouver bien involontairement au milieu d’une nuée de planeurs ou de parachutistes, voire d’un avion de voltige en train de s’exercer.
Deux minutes de temps de vol supplémentaire sont finalement bien peu cher payé face à un éventuel risque d’abordage, ne croyez-vous pas ?
S. MAYJONADE
FI(A) AC Béarn (LFBP)